24 sept 2008

Spuren


L’université est stupide. Elle n’enseigne qu’à aller de la fable à la pensée, ou de la pensée à la fable. Au mieux, pour les meilleurs, elle suggère comment aller de la pensée à la pensée. Mais il faudrait aussi qu’elle apprenne à naviguer de la fable à la fable… sans cesser de penser.

Des histoires de cette sorte, il ne suffit pas de les conter, il faut aussi compter l’heure qu’elles sonnent, dresser l’oreille : où en est-on ? Des événements vient un avertissement qui autrement ne serait pas tel. Ou plutôt : un avertissement déjà présent prend de petits événements pour traces et pour exemples. Ils indiquent un plus ou un moins qui est à méditer en racontant et à raconter en méditant (…) Beaucoup de choses ne se comprennent que dans des histoires de ce genre et non dans un style plus ample et plus relevé. (…) Ce qu’on va maintenant essayer de conter, de faire remarquer, c’est comment on a été frappé par certaines choses. En connaisseur, on remarque en racontant, en remarquant, on dit ce qu’on veut raconter.

Rien à voir avec la première gorgée de bière et d’autres plaisirs minuscules. Ce n’est pas ici qu’on veut rester, mais là-bas qu’on veut aller. Par ici.

Ce sont souvent les impondérables et les bizarreries qui vont le plus loin. (…) Il est bon de penser aussi par fable.

Ernst Bloch, Traces (Spuren, 1932), dans la trad. de Quillet et Hildenbrand aux “Essais” chez Gallimard, p. 14 sq.

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